Objet du mois: le lit pliant, indispensable couchage d’appoint (ou pas) à l’époque soviétique

Vsevolod Tarassevitch / MAMM / MDF / russiainphoto.ru
Vsevolod Tarassevitch / MAMM / MDF / russiainphoto.ru
Solide, léger, facile à manier et déplacer, bon marché et, paraît-il, relativement confortable... le lit pliant ne présentait que des avantages pour les Soviétiques qui manquaient de place chez eux ou n’avaient pas meublé la petite cabane qui leur servait de datcha sur la parcelle de six ares que leur avait allouée l’État.

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Les lits de camp sont connus depuis l’Antiquité. S’ils ont longtemps été réservés à un usage militaire, les progrès de l’industrie métallurgique et l’exiguïté des logements leur ont donné une place importante dans la vie civile en Union soviétique.

Dans la tragicomédie Afonia de Guéorgui Danielia, Nikolaï, que sa femme a chassé de chez eux, débarque chez Afonia une valise dans la main droite et un lit pliant dans la gauche. Si Nikolaï a loué ce couchage, beaucoup de Soviétiques en possédaient un qu’ils rangeaient dans un placard, sur une armoire ou leur balcon.

Exiguïté des logements en ville

Le commun des citadins soviétiques vivait dans des logements de petite taille. Que l’État ait mis à leur disposition une pièce dans un foyer étudiant ou ouvrier, un appartement communautaire ou un appartement de deux ou trois pièces à vivre dans un immeuble de type хрущёвка (khrouchtchiovka) ou брежневка (brijnievka) – leurs noms permettent à eux seuls de comprendre quand ils ont été construits –, la question pour leurs occupants était la même : où placer leurs meubles de façon à ne pas être entravé dans leurs mouvements ? En d’autres termes, comment gagner de précieux mètres carrés ?

Iouri Vendeline, Viktor Roudko / TASS
Iouri Vendeline, Viktor Roudko / TASS

Dans ces conditions, le lit pliant pouvait être une solution plus ou moins temporaire. L’URSS a commencé à en produire pour un usage civil dans les années 1930, à l’époque où le mobilier était encore massif. En 1956, le laminoir de tubes de Tchéliabinsk a lancé la production de lits de camp. Dès la première année, il en a sorti 300 000 unités.

À partir des années 1950, la carcasse des lits pliants était en tubes d’aluminium, métal léger et résistant à la corrosion. Une toile épaisse unie était fixée au cadre par des ressorts dont les extrémités se terminaient en crochets. Un lit de 190 x 70 x 30 (les dimensions standards) pouvait supporter une masse de 100 kilogrammes. Ceux qui n’aimaient pas dormir complètement à l’horizontale ou voulaient lire avant de plonger dans les bras de Morphée pouvaient redresser le cadre d’un côté.

V. Loginov / Sputnik
V. Loginov / Sputnik

Avec le temps, l’offre s’est élargie. On trouvait à la vente des lits avec des toiles unies ou à motifs ; sans toile et avec un grillage métallique accroché au cadre par des ressorts (dans ce cas, il fallait acheter en sus un matelas peu épais) ; sur roulettes avec une planche qui, lorsque le lit était replié, pouvait servir de vide-poches. Des lits de plus petites dimensions ont aussi été fabriqués pour les enfants.

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Quand bien même on ne se plaignait pas du manque de place chez soi, avoir un lit pliant n’était jamais inutile. On pouvait toujours y coucher un parent ou un ami venu rendre visite à l’improviste (pratique courante et tout à fait acceptée en URSS) ou pas.

Couchage à la datcha

Sur les parcelles de 6 ares dont l’État accordait la jouissance à certains citadins, construire une maison n’était pas chose aisée. L’État ne l’interdisait pas mais il fallait accepter de s’engager dans un parcours du combattant : non seulement trouver les matériaux, mais encore à un prix acceptable, les (faire) acheminer sur son terrain et, éventuellement, faire appel à des ouvriers.

Auteur inconnu / Archives d'Olga Mojaïeva / russiainphoto.ru
Auteur inconnu / Archives d'Olga Mojaïeva / russiainphoto.ru

Lorsque la petite bâtisse avait enfin été assemblée, on y installait des meubles dont on ne voulait plus dans son logement en ville. S’il n’y avait pas parmi eux de couchages, des lits pliants faisaient parfaitement l’affaire. D’autant plus qu’on pouvait facilement les sortir pour prendre un bain de soleil dans la journée ou dormir à la fraîche lorsque la chaleur se faisait étouffante à l’intérieur.

Aujourd’hui, en Russie, les lits pliants n’occupent plus la place qu’ils avaient à l’époque soviétique. Ils ont été remplacés par des matelas gonflables (avec gonfleur !) et des canapés-lits, dont certains reprennent le mécanisme.

Valeri Khristoforov / TASS
Valeri Khristoforov / TASS

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