GW2RU
GW2RU

Qu’est-ce qu’être russe selon des écrivains russes?

Fenêtre sur la Russie (Photo : Dmitri Rogouline/TASS, Domaine public, Legion Media, Ivan Chaguine/Sputnik, Galerie Tretiakov, AI/ChatGPT)
Le 4 novembre, la Russie célèbre la Journée de l'unité nationale. Toute personne qui parle russe et adhère aux valeurs morales et culturelles de la Russie peut devenir russe.

Outre sur Telegram, Fenêtre sur la Russie diffuse désormais du contenu sur sa page VK! Vidéos, publications dédiées à l’apprentissage du russe et plus encore dans notre communauté

Le récit d’une scène qui se serait produite en 1839 à la cour de Nicolas Ier nous aide à définir ce qu’est la nation russe.

Lors d’un bal, l’empereur Nicolas Ier et le marquis de Custine, un aristocrate français qui fit un voyage en Russie de juin à septembre 1839, eurent cette conversation :

- Marquis, pensez-vous qu’il y ait beaucoup de Russes dans cette salle ?

- Tous le sont, Majesté, sauf les ambassadeurs et moi !

- Détrompez-vous, marquis. Ce membre-ci de la cour est polonais, celui-là est allemand. Là-bas, ces deux généraux sont géorgiens. Cet autre courtisan est tatar. Voici un Finnois et plus loin un Juif converti.

- Qui sont donc les Russes, Sire ?

- L’ensemble de toutes ces personnes. Voilà qui sont les Russes.

Nicolas Gogol : l’âme russe qui vole

Galerie Tretiakov

Nicolas Gogol caractérisa ses Âmes Mortes comme un « poème ». On y lit de nombreuses digressions et réflexions sur la nature de l’homme russe et sur le destin de la Russie. Certaines d’entre elles sont la source d’expressions devenues courantes comme, par exemple, « Russie, où te précipites-tu ? ».

« Tchitchikov souriait, en sursautant légèrement sur son coussin de cuir, car il aimait la course rapide. Et quel Russe ne l’aime pas ? Pourrait-il en être autrement, alors que son âme aspire à s’étourdir, à voltiger, à dire parfois : "Que le diable emporte tout !" Pourrait-on ne pas aimer cette course, lorsqu’on y éprouve un merveilleux enthousiasme ? On dirait qu’une force inconnue vous a pris sur son aile. On vole, et tout vole en même temps », écrivait Nicolas Gogol au sujet de l’âme russe.

Fiodor Dostoïevski : les Russes s’accommodent de tous

Galerie Tretiakov

« Oui, nous croyons, dirai-je, que la nation russe est un phénomène extraordinaire dans l’histoire de l’humanité. Le caractère des Russes diffère à tel point de celui de toutes les autres nations européennes, que leurs voisins sont vraiment dans l’impossibilité de les comprendre », notait Fiodor Dostoïevski dans son Journal d’un écrivain.

Lire aussi : La Russie et les Russes dans les romans d'écrivains étrangers

Il affirmait que la « fraternité universelle » et l’« humanité universelle » étaient des qualités russes, « Chez le Russe il n’y a pas l’impénétrabilité, l’intolérance européennes. Le Russe peut s’accommoder facilement des tendances universelles, sait s’assimiler toute idée. Il voit tout de suite le bon côté de ce qui peut servir à toute l’espèce humaine, de ce qui peut avoir le moindre intérêt pour elle en général », développait Fiodor Dostoïevski également dans son Journal d’un écrivain.

Ivan Tourgueniev : la langue des Russes est leur force !

Domaine public

« Aux jours de doute, aux jours où l’incertitude sur les destins de ma patrie pèse comme un fardeau, tu es mon seul soutien, mon seul appui, Ô toi, grande, puissante, loyale et libre langue russe. Comment, sans toi, ne pas tomber dans le désespoir, au spectacle de ce qui se fait chez nous ? Non, il est impossible de croire qu’une langue pareille ne soit pas l’apanage d’un grand peuple ! », écrivait Ivan Tourgueniev dans son ode en prose La Langue Russe.

Léon Tolstoï : de la profondeur de la foi du peuple

Domaine public

« Depuis les temps reculés, à côté de l’officielle, une foi chrétienne vivante, non officielle, autre a toujours animé le peuple russe. Elle a emprunté une voie étrange, celle des vies saints, des vénérables moines, des fols-en-Christ, des pèlerins et a pénétré le peuple. Elle s’est affermie en lui grâce aux proverbes, aux récits, aux légendes et l’anime », écrivait Léon Tolstoï en 1907.

« L’essence de cette foi est que l’homme doit vivre selon la loi de Dieu, pour le bien de son âme ; que les hommes sont tous frères ; que ce qui est grand pour les hommes est médiocrité pour Dieu ; que l’homme gagnera son salut non en respectant les rites et en récitant les prières, mais en était miséricordieux et aimant. Cette foi a toujours été présente dans le peuple et elle était la véritable foi qui guidait sa vie. Elle a toujours été présente à côté de la foi fallacieuse de l’Église qui, en apparence, avait imprégné le peuple », expliquait l’auteur de Résurrection.

Constantin Aksakov : de la liberté

Domaine public

« Le peuple russe n’est pas un peuple : il est l’humanité. Il est un peuple parce qu’il est composé de différents peuples au sens national du terme. L’humanité est de ce fait en lui caractère national. Le peuple russe est libre, il n’a en lui aucun élément étatique formel, il n’a rien en lui de conventionnel », relevait l’écrivain slavophile Constantin Aksakov.

Alexis Tolstoï : de la force du caractère russe

Ivan Chaguine / Sputnik

L’écrivain soviétique Alexis Tolstoï, un parent lointain de l’auteur de Guerre et Paix, a consacré un récit au caractère russe.

Lire aussi : Que cache réellement le concept d’«âme russe»?

Bien que conscient qu’il s’agit là d’une notion plurielle, il tente de décrire ce caractère russe et donne l’exemple d’un simple paysan. C’est un homme beau comme « le dieu de la guerre » au sourire éclatant. Avant qu’il ne parte pour le front, son père lui dit : « Mon fils, tu verras beaucoup de choses sur cette Terre, tu verras d’autres pays, mais reste toujours fier d’être russe ».

À la guerre, il est grièvement brûlé au visage et subit plusieurs opérations. Lorsqu’il rentre dans son village, ses parents et sa fiancée ne le reconnaissent pas. Il n’ose pas leur dire qui il est et se fait passer pour un autre. Plus tard, dans une lettre qu’il leur adresse, il révèle que c’était lui. Sa fiancée va le retrouver dans son unité et lui jure de l’aimer toute sa vie.

« Voilà ce que sont les caractères russes ! On dirait que l’homme est simple. Un malheur le frappe durement. Dans les grandes choses comme dans les petites, une grande force monte en lui : celle de la beauté humaine », conclut Alexis Tolstoï.

Dans cet autre article, découvrez vingt symboles officieux de la Russie.