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Que montre Constantin Makovski sur son tableau La Fête de Maslenitsa sur la place de l’Amirauté?
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Un rebelle devenu professeur
Constantin Makovski (1839-1915) sut allier dans son œuvre l’académisme et le non-conformisme. Il fut l’un des meilleurs élèves de l’Académie impériale des Beaux-Arts. Mais, en 1863, il refusa de participer au concours dont le règlement était de réaliser un tableau sur un sujet imposé et la récompense, la « grande » médaille d’or. Il entra alors dans un atelier de peintres professionnels et se mit à peindre des scènes de la vie des habitants de la capitale. Parmi les toiles de cette époque : Saint-Pétersbourg fête Maslenitsa sur la place de l’Amirauté. Ce tableau, présenté à l’exposition annuelle de l’Académie des Beaux-Arts, lui valut le titre de professeur. Le tsar Alexandre II en fit l’acquisition pour 900 roubles pour son palais de Gatchina.
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Divertissements
Sur cette toile aux dimensions imposantes de 3, 21 x 2, 15 m, Constantin Makovski représente une des fêtes les plus appréciées en Russie : celle de la semaine grasse de Maslenitsa précédant le début du carême de Pâques. C’était un temps de carnaval lié à la fin de l’hiver et au renouveau de la nature qui se faisait sentir. À Saint-Pétersbourg, au milieu du XIXe siècle, les gens venaient se promener sur l’immense place qui entourait l’Amirauté (aujourd’hui, les jardins Alexandre et du palais d’Hiver). On y installait pour l’occasion des baraques et des théâtres forains où se produisaient des acteurs et des skomorokhi, où l’on montrait des spectacles de marionnettes, où l’on montait des tableaux vivants.
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« Les balagany, c’étaient des ʺthéâtresʺ divers et variés, grands, ronds, en forme de boîtes avec des galeries, des passages et des escaliers fraîchement construits. Les manèges, les balançoires, les panoramas optiques poussaient çà et là comme des champignons et finissaient par recouvrir la place. Sur le fond d’images effrayantes de bêtes féroces, d’oiseaux, de volcans, de Maures, il se passait quelque chose d’étrange : des hommes costumés se déplaçaient, s’affairaient : quelque chose qui faisait penser à un Arlequin à la voix rauque et au cou bandé, à côté d’une ʺcosaqueʺ qui faisait des grimaces étudiées et avait une plume sur son chapeau polonais, un autre arlequin frappait dans un tambourin ... », se souvenait Elena, la fille de Constantin Makovski.
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Fête pour tous
Les critiques contemporains du peintre écrivirent que, sur cette toile, c’était tout Saint-Pétersbourg, des représentants de toutes les classes sociales qui se promenaient et se distrayaient : un homme au pince-nez se donne des grands airs, une jeune femme coiffée d’un chapeau à la dernière mode tient ses mains au chaud dans un manchon de fourrure, des femmes de marchands aux formes opulentes, des vendeurs de noix et d’autres choses à manger, des enfants à la rue dans des vêtements usés, un vendeur de thé avec son samovar, un policier qui regarde on ne sait quoi, un jeune voleur, des acteurs déguisés...
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Spectacle à la mode
À côté des théâtres forains, Constantin Makovski a représenté un spectacle à la mode à l’époque : celui des tableaux vivants. En l’occurrence, L’Eruption du Vésuve. Ceux qui voulaient se faire peur ne manquaient pas. Ils voulaient aussi « entrer » dans le célèbre tableau de Karl Brioullov Le Dernier Jour de Pompéi, qu’il avait peint après avoir visité les vestiges de la cité romaine.
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Cette toile et celle de Constantin Makovski furent souvent comparées du fait du nombre de leurs personnages. À la différence de Karl Brioullov qui était un maître de la peinture d’histoire, la Maslenitsa de Constantin Makovski donne à voir à ceux qui avait la possibilité d’admirer sa toile des personnages qui leur étaient contemporains et dont ils comprenaient qui ils étaient.
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En 1897, cette toile de Constantin Makovski rejoignit les collections du Musée Russe auquel elle appartient jusqu’à aujourd’hui.
Qui est cette « femme de marchand » représentée sur le célèbre tableau de Boris Koustodiev ? Trouvez la réponse dans cette autre publication.