Enseignante tunisienne: la Russie crée de grandes perspectives pour notre jeunesse
La version intégrale de l’entretien a été publiée en russe dans le magazine Le Monde Russe (Rousski Mir).
Quel est l’état actuel de l’apprentissage du russe en Tunisie ?
Randa Zayani : Le russe est enseigné dans 20 lycées publics répartis dans 12 villes tunisiennes, couvrant ainsi la moitié du pays. Il est également proposé comme spécialisation à l’Institut supérieur des langues de Tunis, ainsi que comme matière à l’Institut supérieur des études touristiques et hôtelières de Sidi Zrif, à l’Institut National du Travail et des Études sociales de La Manouba et à l’Institut Bourguiba des langues vivantes.
Cette année, l’Institut supérieur des sciences humaines de Tunis a lancé des cours de russe. Cet idiome est également enseigné à la Maison russe, ainsi que dans certaines écoles privées. L’offre d’enseignement du russe a fortement augmenté : il y a trois ans, 16 lycées et 2 instituts offraient des cours, contre 20 lycées et 5 établissements d’enseignement supérieur aujourd’hui.
Le russe est enseigné en Tunisie depuis l’époque soviétique. Comment qualifier l’évolution de son enseignement ?
Randa Zayani : Ces dernières années, nous constatons un renforcement perceptible des relations entre la Tunisie et la Russie et cette dynamique commence à se refléter dans l’enseignement du russe dans mon pays. La contribution de spécialistes russes au développement de méthodes d’enseignement du russe langue étrangère est aujourd’hui plus importante qu’à l’époque soviétique. Le choix des manuels et des ressources pédagogiques s’est considérablement élargi, ce qui améliore nettement la qualité de l’enseignement.
Le soutien de la Russie à la Tunisie dans le secteur éducatif est substantiel et très appréciable. Cette année, Moscou offre 80 bourses aux étudiants tunisiens, ce qui leur ouvre de grandes perspectives et stimule l’intérêt des jeunes pour la langue russe.
Quelles sont les principales motivations des Tunisiens, jeunes et adultes, pour apprendre le russe : culture, voyages ou études supérieures en Russie ?
Randa Zayani : Les motivations sont évidemment différentes selon les groupes d’âge. Chez les enfants tunisiens, l’intérêt naît souvent des vidéos réalisées par des enfants russes dans lesquelles ils parlent de leur quotidien, mais aussi montrent la nature, évoquent les fêtes et les traditions de leur pays. Ces contenus, à la fois ludiques et éducatifs, permettent aux jeunes de découvrir la culture et le mode de vie russes tout en facilitant l’apprentissage de la langue via des applications numériques. Le nombre d’enfants voulant apprendre le russe augmente chaque année et beaucoup d’entre eux fréquentent les cours linguistiques proposés par la Maison russe.
Les adolescents préfèrent les jeux vidéo, devenus leur activité de prédilection. Ces jeux offrent la possibilité d’interagir et de jouer avec des Russes. D’autres adolescents s’intéressent à l’actualité et à la culture russes.
Quant aux adultes, ils s’informent sur la vie en Russie et sur les universités, qui sont considérées comme une excellente option pour poursuivre ses études à l’étranger. Par ailleurs, perçus comme des modèles de sagesse, de force et de leadership, les dirigeants et figures culturelles russes suscitent un vif intérêt auprès des adultes.
Combien y a-t-il de diplômés d’universités soviétiques ou russes en Tunisie ? À quel point les études en Russie y sont-elles populaires ?
Randa Zayani : Aujourd’hui, plus de 8 000 étudiants tunisiens poursuivent leurs études en Russie, ce qui en fait la cinquième destination la plus prisée par les Tunisiens souhaitant étudier à l’étranger. Des milliers d’entre eux ont déjà obtenu leur diplôme dans des universités russes et exercent aujourd’hui en Tunisie dans divers domaines tels que la médecine, la traduction, l’ingénierie, l’agriculture ou encore le tourisme. [Beaucoup d’entre eux, ndlr] occupent des postes importants dans des institutions publiques et privées.
Que représente la Russie pour les Tunisiens ? Que savent-ils de notre pays ?
Randa Zayani : Les Tunisiens en savent plus sur l’histoire de la Russie que sur son actualité. Ils connaissent bien les dirigeants soviétiques et le rôle joué par la Russie durant la Seconde Guerre mondiale – bagage acquis grâce à des films, romans et cours d’histoire à l’école.
En Tunisie, l’écrivain russe le plus célèbre reste Dostoïevski - on lui attribue de nombreuses citations, authentiques ou non. Les Tunisiens apprécient également les sports russes et s’intéressent particulièrement aux activités du président Vladimir Poutine.
Aux yeux des Tunisiens, la cathédrale Saint-Basile demeure l’un des symboles les plus emblématiques de la Russie, bien que beaucoup en ignorent le nom exact. Les poupées russes Matriochkas figurent elles aussi parmi les symboles les plus connus du pays. Enfin, des chansons telles que Kalinka et Katioucha sont connues en Tunisie.
La culture russe suscite-t-elle l’intérêt des Tunisiens ?
Randa Zayani : Ces dernières années, nous avons pu constater la participation active du théâtre russe aux Journées du Théâtre de Carthage, ce festival international qui se tient chaque année. J’ai eu l’occasion d’assister à deux spectacles russes : la salle était comble et les deux productions s’inspiraient d’œuvres d’Anton Tchékhov.
De jeunes amateurs de théâtre tunisiens m’ont confié que, pour eux, le théâtre russe est une véritable école d’art au sein de l’immense monde théâtral. C’est précisément pour cette raison qu’il suscite tant d’intérêt et d’admiration et ses meilleures traditions sont étudiées dans les universités et restent encore aujourd’hui une référence.
Dans cette autre publication, nous racontons comment évolue l’enseignement du russe comme langue étrangère