33 curiosités sur les 33 lettres de l’alphabet russe
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Аа
La première lettre de l’alphabet russe et l’une des plus courantes. Elle est dérivée de l’alpha grec et il n’existe pratiquement aucun mot originellement russe commençant par cette lettre. À l’exception de « avos » (à son propos, lisez ici). Il est également intéressant de noter qu’en vieux slave, cette lettre était appelée « Az », tout comme le pronom Я (« je »). « Азъ есмь царь » (Az esm’ tsar) signifiait ainsi « Je suis le tsar ».
Бб
Cette lettre n’existe pas en latin, mais il y a un son identique – et il appartient à la lettre B, dérivée du grec beta. Elle a une fonction tout à fait indépendante en russe – après tout, c’est à la lettre Б que la particule du subjonctif et du conditionnel « бы » est souvent abrégée. « Если б я был султан » (Ièsli b ia byl soultan, Si j’étais le sultan), chantée dans le film soviétique La Prisonnière du Caucase en est un bon exemple.
Вв
L’orthographe de cette lettre est similaire à celle du grec beta, mais elle se lit comme le V français. Cependant, cette lettre se prononce aussi souvent comme un F, par exemple dans les mots « любовь » (lioubov, amour) ou « вторник » (vtornik, mardi). Et parfois, elle n’est pas prononcée du tout ! Comme, par exemple, le premier « в » du mot « чувство » (tchoustva, sentiment). « В » est également une préposition signifiant « dans/en ».
Гг
La façon dont un Russe prononce cette lettre, si elle se trouve au début d’un mot, permet de savoir d’où il vient ! Dans les dialectes des régions de Toula et de Riazan, par exemple, l’on adoucit ce G (c’est ce qu’on appelle le G fricatif), tandis que les habitants du sud de la région de Krasnodar peuvent le prononcer comme un Kh (c’est ce qu’on appelle le G guttural – c’est la norme pour la langue ukrainienne, par exemple). Il existe même un verbe en russe, « гэкать » (guèkat’), c’est-à-dire prononcer la lettre de manière incorrecte. En revanche, il est tout à fait normal d’adoucir le Г à la fin du mot « бог » (bog, dieu), par exemple.
Дд
Cette lettre vient du grec delta, et dans l’alphabet du vieux-slave, on l’appelait « dobro » (bien). Cependant, quel est ce « bien » si son orthographe est si différente en lettre d’imprimerie et en cursive ! Et le « д » minuscule ressemble en cursive au « g » français... Une autre particularité est l’assourdissement du son « Д » à la fin des mots et devant les consonnes sourdes. Soyez donc attentif et sachez reconnaître si l’on vous parle de « code » (код, kod) ou de « chat » (кот, kot).
Ее
Cette lettre est apparue sous cette forme après la réforme de la langue russe par Pierre le Grand et l’introduction de la police d’écriture civile (par opposition à la police d’écriture ecclésiastique). Auparavant, cette lettre ressemblait à Є, mais il était trop facile de la confondre avec la lettre Э (è), qui est même souvent appelée « Э-à l’envers » pour éviter toute confusion. D’ailleurs, elles se prononcent de la même manière. Toutefois, au Е, au début d’un mot ou après une voyelle, l’on ajoute le son Й (ï).
Ёё
Cette lettre, prononcée « io », n’a été officiellement approuvée qu’en 1942, l’alphabet comptant alors 32 lettres. Auparavant, Ё était considérée comme une simple variante de la lettre E. Cependant, à ce jour, le Ё est souvent discriminé et mis sans trémas. La prononciation correcte ne ressort alors clairement qu’à l’oral (pauvres étrangers qui apprennent la langue !).
Жж
C’est la lettre la plus « bourdonnante » de la langue russe. Elle commence le mot « жук » (jouk, coléoptère), il y en a jusqu’à trois dans le mot « жужжание » (joujjanié, bourdonnement), et beaucoup de gens trouvent même dans son contour la forme d’un insecte. Cette lettre n’existait pas en grec, elle venait du vieux-slave et ne signifiait rien d’autre que « vie ».
Зз
À l’origine, la lettre З ressemblait à son analogue grec (et latin) : Z. Pendant longtemps, elle a même existé dans ces deux formes simultanément. Cependant, au fil du temps, seule la forme en З a été retenue. Il convient d’être prudent avec cette lettre, car parfois elle et la lettre C (S) échangent littéralement de son. Par exemple, dans le mot « сказка » (skazka, conte), le son Z est remplacé par le son S, alors que dans le mot « сделать » (sdiélat’, faire), c’est au contraire un Z clair (devant une consonne) qui est utilisé. Dans un grand nombre de préfixes, З et С sont même interchangeables, en fonction de la lettre qui suit. « Бесполезный » (bespalièzny, inutile), mais « безрадостный » (bezradostny, sans joie).
Ии
Elle est dérivée de la lettre grecque ita, qui avait la forme d’un H. En vieux-slave, cette lettre était appelée « ijé », ce qui se traduisait par « qui ». Dans la langue russe, l’on trouve encore aujourd’hui l’expression « и иже с ними » (i ijé s nimi), c’est-à-dire des personnes semblables, qui partagent les mêmes idées. Avant la réforme de la langue russe en 1917, l’alphabet russe comportait également la lettre I, comme le iota grec, mais les bolcheviks l’ont remplacée par И. Par exemple, le mot « мiр » (mir) désignait le « monde », tandis que le mot « мир » (également mir) signifiait la « paix ». Aujourd’hui, tous deux s’écrivent « мир ».
Йй
Il est intéressant de jouer avec cette lettre, en se rappelant les mots qui commencent par elle : йод (iode), йога (yoga), йогурт (iogourt, yaourt)... la plupart du temps, bien sûr, il s’agit de mots empruntés. Officiellement, cette lettre n’est apparue en tant que telle qu’au XXe siècle, et avant cela, elle était désignée par la lettre И surmontée d’un tiret. Le son lui-même se rapproche du « ï » français et est appelé « и краткое » (i kratkoïé, i court).
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Кк
Cette lettre vient du grec et est familière à ceux qui connaissent l’alphabet latin. Seule la forme minuscule est graphiquement différente. Elle n’a en effet pas de ligne ascendante proéminente, elle n’est qu’une copie réduite de la majuscule, qui ne dépasse pas la ligne. Il est pratiquement impossible de trouver la combinaison du « К » avec le « Ы » ou le « Э » dans les mots russes – seulement dans les mots empruntés ou les mots des langues des peuples de Russie : « акын » (akyn, poète des peuples turciques d’Asie centrale), « кэш » (kèch, cash).
Лл
Officiellement, la lettre s’appelle aussi « el », mais son écriture cursive est similaire non pas à son analogue latin, mais au lambda grec (Λ). Toutefois dans les textes imprimés, elle ressemble à la lettre russe « П », mais avec une patte courbée. Cette mode a été introduite par les imprimeurs de Saint-Pétersbourg au XIXe siècle, et c’est encore la norme aujourd’hui.
Мм
On trouve cette lettre dans la capitale russe et dans d’autres villes du pays, en gros caractères de couleur rouge – il s’agit du signe du métro. La lettre se lit comme le latin M, mais comme elle vient du grec, la minuscule a acquis une écriture différente. Elle s’adoucit après de nombreux sons vocaliques, ce qui en fait la lettre la plus mignonne de la langue – un chat dit « мяу » (miaou), et nous disons « мимими » (mimimi) lorsque nous sommes attendris.
Нн
La lettre responsable du refus et de la négation. « Нет » (nièt, non), « не » (nié, pas), « никак » (nikak, pas du tout). La lettre la plus utilisée parmi les consonnes. Dérivée de la lettre nu de l’alphabet grec, elle déroute tous les étrangers en s’écrivant non pas N mais H. Or, il n’en a pas toujours été ainsi. Dans les anciens textes religieux, la barre transversale de la lettre était inclinée, mais au milieu entre les lignes verticales. À l’époque de Pierre le Grand, la barre transversale a finalement été placée à l’horizontale.
Оо
C’est la lettre la plus utilisée dans la langue russe. Cependant, dans les syllabes sans accent, les Russes ne la prononcent souvent pas, mais comme s’ils la remplaçaient par quelque chose entre O et A (en phonétique, ce son est désigné par [ɐ]). Les Moscovites sont souvent moqués dans les régions parce qu’ils étirent le nom de leur ville comme Maaaaaskva. Nous prononçons également le nom du président Obama comme « Abama », ce qui perturbe les Américains qui ne savent pas de quoi nous parlons. En revanche, dans les villages du nord de la Russie, l’on peut rencontrer des gens qui « okaïout », c’est-à-dire qui prononcent toujours les O tels quels, ce qui n’est pas naturel pour l’oreille d’un Russe moderne.
Пп
Vous connaissez certainement le nombre π, et c’est à partir de cette lettre grecque que le П est apparu en russe (nous l’appelons toutefois « pé », comme en français, et non « pi »). Attention toutefois, en lettre cursive, il ressemble généralement au n latin.
Рр
Cette lettre déroute souvent les étrangers. En effet, elle ressemble au P, mais se lit comme un R. Néanmoins, il est facile de s’en souvenir : les mots « Россия » (rassia, Russie), « русский » (rousski, russe) et « рубль » (rouble) commencent tous par elle ! Dans l’ancienne version, cette lettre était appelée « rtsi » ou « rtsy » et signifiait « parle ».
Сс
Autrefois, la langue russe comportait également la lettre S telle quelle, qui existe d’ailleurs toujours dans certains alphabets cyrilliques (macédonien, par exemple). Les deux lettres remontent au sigma grec. Au début du XVIIIe siècle, Pierre Ier a introduit l’écriture civile et le S, dont la sonorité était souvent plus proche de celle du Z, a fusionné avec le З. En revanche, le С est resté sous cette forme. L’on pense qu’il a pris la forme d’un petit sigma grec – ς, dont la queue inférieure a été supprimée pour des raisons de simplicité. Le C est une lettre importante, car elle désigne le « слово » (mot, parole). « Au commencement était le Verbe [slovo en russe, dans le sens de parole] », dit la première ligne de l’Évangile.
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Тт
T est dérivé de la lettre grecque tau (Τ, τ), sa graphie est donc différente de celle du latin T, t. Attention, en cursive, le petit t ressemble davantage au m français. C’est l’une des rares lettres de la langue russe qui ne peut parfois pas être lue du tout. Par exemple, dans les combinaisons complexes « стн », « стск » et autres – « лестница » (lièsnitsa, escalier) ou « счастливый » (chaslivy, heureux).
Уу
Dans ses grandes lignes, cette lettre est très proche du i grec latin (Y) ou du grec upsilon. Cependant, son histoire est plus compliquée et elle n’est apparue en tant que lettre que sous Pierre le Grand et sa nouvelle écriture civile. Aujourd’hui, le У russe correspond en phonétique au son OU [u], mais auparavant, il était écrit comme une combinaison de deux lettres, comme en français : ОУ – O et « ijitsa » (V, v) qui venait elle-même de upsilon et signifiait le son [i]. À l’écrit, le complexe « оу » se présentait toujours différemment : tantôt Ꙋ, tantôt ꙋ. C’est pourquoi il a été simplifié en У.
Фф
Si vous voulez exprimer votre mécontentement, prononcez simplement cette lettre. En russe, on appelle cela « фыркать » (fyrkat’, renâcler), s’exclamer « фу » (fou, onomatopée désignant le dégout). Cette lettre vient du grec phi et se retrouve souvent dans des mots empruntés.
Хх
En russe, cette lettre est responsable du rire (хихихи ахахах – hihihi ahahah) et d’un grand nombre de mots obscènes, que nous ne pouvons citer ici, ainsi que d’un nombre encore plus grand de leurs dérivés. En même temps, il s’agit de l’équivalent de la combinaison française CH, de sorte que le nom du Christ commence par cette lettre en russe (Христос, Khristos), tandis que sa prononciation se rapproche de la jota espagnole.
Цц
Cette lettre correspond au son « ts », c’est pourquoi on la retrouve dans des mots étrangers contenant un C ou un Z latins : par exemple, César (цезарь) ou pizza (пицца). Par ailleurs, Ц est une interjection, très imagée d’ailleurs. On peut dire « цыкнуть » (tsyknout’, faire taire) pour empêcher quelqu’un de parler au théâtre. Vous pouvez aussi prononcer un Ц prolongé lorsque votre patron vous ordonne de refaire un rapport. Vous pouvez également « цокнуть » (tsoknout’, faire résonner, claquer) vos talons sur le sol, ou votre langue pour exprimer votre mécontentement.
Чч
En vieux-slave, cette lettre, prononcée « tch », était appelée « tcherv’ ». Elle provient du signe cyrillique Ҁ (« koppa »), issu du système numérique grec ancien et désignant le nombre 90. Finalement, le Ч russe a également un lettrage en forme de « bol », mais pas vertical, plutôt horizontal. Dans les combinaisons avec d’autres lettres, le Ч essaie toujours de disparaître – « что » (que, quoi) est prononcé « chto », tandis que « конечно » se lit « kanièchna ». Dans l’ancien dialecte moscovite, il y avait beaucoup d’autres métamorphoses du Ч, par exemple, « булочная » se prononçait « boulochnaïa », et non « boulotchnaïa » comme il est d’usage aujourd’hui.
Шш
La plus chuintante des lettres de la langue russe еt la plus difficile à reconnaître en cursive (le mot chinchilla, par exemple, a de quoi offrir en russe les plus sévères mots de tête, comme le montre l'image ci-dessus). Il est probable qu’elle soit entrée dans la langue russe à partir de la lettre shin de l’alphabet hébreu. Officiellement, cette lettre s’appelle « cha », et la même interjection est utilisée (plus souvent dans le Sud) pour demander à quelqu’un de se taire rapidement.
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Щщ
La lettre la plus terrible et la plus monstrueuse, qui, dans la transcription française, ne peut être transformée qu’en chtch – pauvre Khrouchtchev ! Dans de nombreuses langues slaves, cependant, il existe des sons Ch+T ou Ch+Tch, que cette lettre représente. Vous pouvez également dire « chtcha » si l’on vous appelle pour aller quelque part (contraction familière de « сейчас », de suite).
Ъъ
Cette lettre n’est aucunement prononcée, elle est appelée signe dur et a une fonction purement technique de séparateur lorsque le préfixe d’un mot se termine par une consonne et que la racine se termine par une voyelle. Par exemple, « объявление » (abivliénié, annonce). Certaines langues ou phonétiques utilisent l’apostrophe à cette fin. Cependant, avant la révolution de 1917, cette lettre était beaucoup plus courante. Elle se plaçait souvent à la fin d’un mot, après une consonne, pour indiquer le genre masculin. On la voit souvent sur les enseignes de magasins, comme СмирновЪ, cherchant à se forger une identité « tsariste ».
Ыы
C’est la lettre la plus difficile à prononcer pour les étrangers. Il n’y a pas de mots dans la langue russe qui commencent par Ы (à l’exception des toponymes dans les républiques où une autre langue est répandue. Par exemple, en Iakoutie, l’on trouve la rivière Ыгыатта – Yguyatta). Aujourd’hui, Ы est aussi la lettre la plus drôle de l’alphabet russe. Tout d’abord, Opération Y est une comédie soviétique emblématique. Ensuite, dans la langue de l’Internet, Ы, ainsi que Ыыыыы, désignent un rire, sorte de version russe de LOL. Il est utilisé pour une blague pas très intellectuelle ou un mème stupide. Essayez de mettre votre mâchoire inférieure en avant et de prononcer un long Yyyyy et vous comprendrez.
Ьь
Le signe mou est également, comme le signe dur, non prononcé, mais il a un certain nombre de fonctions techniques. Il est nécessaire pour séparer les voyelles et les consonnes : семя (siémia, graine) et семья (simia, famille) se lisent non seulement différemment, mais ont aussi des significations différentes. De plus, le signe mou adoucit les consonnes à la fin d’un mot, comparez « мат » (mat, juron) et « мать » (mat’, mère). De même, un Ь à la fin d’un verbe indique la forme infinitive. Les erreurs les plus fréquentes sont commises non seulement par les étrangers, mais aussi par les Russes eux-mêmes, par exemple dans les verbes qui se terminent par -ться/-тся.
Ээ
Nous avons déjà parlé du « Э-à l’envers » dans le paragraphe consacré au Е. Autrefois, il y avait deux lettres miroirs, mais sous Pierre le Grand, seul le Э est resté. La lettre Э est le plus souvent utilisée dans des mots d’emprunt (поэт – poète, сэр – sir), mais aussi dans des pronoms comme этот (ètot, ce) ou dans des onomatopées.
Юю
Cette lettre est apparue au début du XVIIIe siècle à partir d’un composé de trois sons – I+O+U. Elle est utilisée assez rarement, souvent dans des mots et des noms empruntés – « Юпитер » (Ioupitèr, Jupiter), par exemple. On le trouve dans des verbes à la première personne du présent (Я люблю – Ia lioubliou, j’aime) ou dans certaines formes de noms (par exemple, au cas datif – князю, kniaziou, au prince). Cependant, il existe de nombreuses exceptions avec elle, et toutes les lettres ne peuvent pas être ses voisines.
Яя
La dernière lettre de l’alphabet et, en même temps, le pronom personnel de la première personne du singulier. Cette lettre est l’image inversée du R latin, elle est donc souvent source de confusion pour les étrangers et les enfants russes qui apprennent à écrire (il est souvent plus facile pour eux d’écrire R). La lettre ressemblait autrefois à IA (et est toujours lue ainsi), mais sous Pierre le Grand, elle a été fusionnée en une seule lettre. Si elle ne se trouve pas au début d’un mot ou devant une voyelle, elle se lit comme A, en adoucissant la consonne qui la précède.
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