
Quatre lieux mystiques auxquels croyaient les Russes

Outre sur Telegram, Fenêtre sur la Russie diffuse désormais du contenu sur sa page VK! Vidéos, publications dédiées à l’apprentissage du russe et plus encore dans notre communauté
Belovodié

La légende d’une terre où les gens vivent librement et sans misère, en conservant la foi de leurs ancêtres, est apparue au début du XVIIIe siècle. L’orthodoxie y aurait été introduite par l’apôtre Thomas lui-même. Belovodié avait ses propres églises et même un tsar juste. Il n’y avait ni vol ni meurtre, et même l’Antéchrist n’avait aucun pouvoir sur cet endroit. Les terres étaient fertiles malgré le climat rigoureux, et elles renfermaient beaucoup d’or et de pierres précieuses. Seuls les justes pouvaient accéder à ce pays merveilleux, situé très loin sur des îles, à 44 jours de voyage à travers la Chine jusqu’aux côtes de l’océan.
Les vieux-croyants (des orthodoxes ayant refusé les réformes du patriarche Nikon au XVIIe siècle) croyaient en l’existence de ce paradis sur terre. Confrontés à des persécutions en raison de leur foi, ils cherchaient un endroit où ils pourraient vivre en paix. Avec le temps, ils ont commencé à considérer comme étant Belovodié le territoire des vallées des rivières Boukhtarma et Ouïmon (entre la Russie et le Kazakhstan actuels), où leurs colonies ont vu le jour.
Kitej
La légende de l’Atlantide russe est apparue aux XVIIe et XVIIIe siècles. Le manuscrit vieux-croyant du « Livre, dit chroniqueur, écrit en l’an 6646, le 5 septembre » mentionne l’histoire de la ville de Kitej. Elle aurait été construite par le prince Gueorgui Vsevolodovitch, qui, en voyageant sur les rivières, arriva au lac Svetloïar. Il fut frappé par la beauté du lieu et y fonda la ville de Kitej. Selon le manuscrit, les troupes du khan Baty, venues en Russie, détruisirent cette ville merveilleuse et tuèrent tous ses habitants, y compris le prince. Selon une autre version, sous les yeux des envahisseurs stupéfaits, la ville aurait disparu dans les eaux du Svetloïar. Depuis lors, seuls ceux qui n’ont pas de mauvaises intentions dans leur cœur peuvent la voir et entendre le son des cloches des églises de Kitej.
Une partie de la légende est vraie. Le grand prince de Vladimir Iouri (Gueorgui) Vsevolodovitch est un personnage réel. Il était le petit-fils de Iouri Dolgorouki, a effectivement combattu les troupes de Baty en 1238 et a été vaincu lors de la bataille sur la rivière Siti. Cependant, tout le reste est une fiction. Et pourtant, aujourd’hui encore, les gens se rendent dans la région de Nijni Novgorod, où se trouve le lac Svetloïar, dans l’espoir d’apercevoir dans ses eaux le reflet des dômes dorés ou d’entendre les sons des chants solennels.
Loukomorié

« Chêne vert près de [Loukomorié] ; chaîne dorée sur l’arbre de chêne », c’est comme ça qu’Alexandre Pouchkine décrivait l’île au bout du monde dans son poème fantastique Rouslan et Ludmila. Cependant, voilà ce qui est intéressant : une terre avec ce nom existait vraiment et était mentionnée dans l’épopée russe Le Dit de la Campagne d’Igor. Là, Loukomorié désignait la région nord du littoral de la mer d’Azov, d’où les Polovtses attaquaient la Rus’ de Kiev.
Au XVIIe siècle, ce nom désignait sur les cartes l’actuelle région de Tomsk. Et au XIXe siècle, Nikolaï Karamzine, dans son Histoire de l’État russe, a écrit à propos de Loukomorié en faisant référence au Nord de la Russie. Il citait également les légendes qui y sont associées : dans les montagnes brûle le feu du purgatoire, les habitants meurent chaque année le 27 novembre, jour de la Saint-Georges, et ressuscitent le 24 avril. De plus, cet endroit est habité par des hommes à tête de chien, couverts de fourrure animale.
La Terre de Sannikov

C’est une île fantôme, une terre de printemps éternel, où les oiseaux se rendaient pour hiverner et élever leur progéniture. L’on en a parlé pour la première fois en 1810 : le marchand Iakov Sannikov a aperçu, près des îles de Nouvelle-Sibérie dans l’océan Arctique, les contours d’une terre inconnue avec de hautes montagnes rocheuses. Il n’y avait aucune raison de ne pas le croire : il connaissait très bien ces lieux et avait découvert plusieurs îles. La migration des oiseaux confirmait ses dires. Néanmoins, il n’était pas aisé de prouver qu’il avait raison : le climat ne permettait pas d’envoyer des expéditions aussi loin. L’on ne pouvait que se fier aux observations. Ce n’est qu’en 1937 que le brise-glace soviétique Sadko a pu s’approcher au plus près de l’emplacement possible de l’île et... n’a rien trouvé ! Les scientifiques en sont convaincus : comme les autres îles de l’archipel de Nouvelle-Sibérie, la Terre de Sannikov était constituée de pergélisol et a simplement fondu avec le temps.
Cependant, la légende de ces terres chaudes inaccessibles est restée dans la littérature : le scientifique Vladimir Obroutchev a écrit un roman d’aventure intitulé La Terre de Sannikov et portant sur leur recherche.
Dans cet autre article, découvrez cinq lieux sacrés de la mythologie slave.