Cinq faits de la vie du prix Nobel de littérature Mikhaïl Cholokhov

Pavel Gorchkov / Sputnik
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Le 24 mai 2025, Mikhaïl Cholokhov, l’auteur de l’épopée Le Don Paisible, aurait officiellement eu cent vingt ans. L'occasion pour nous de nous souvenir de cinq faits qui marquèrent sa vie et son œuvre.

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1. Accusé de plagiat

Mikhaïl Cholokhov devint célèbre à la sortie de son épopée Le Don Paisible consacrée aux cosaques du Don durant la Grande Guerre et la guerre civile. De nombreux critiques doutèrent rapidement qu’il en ait été l'auteur. Les uns avancèrent qu'il avait publié sous son nom le manuscrit d'un officier blanc, resté anonyme, qui avait été fusilé par les bolcheviks. D'autres ne croyaient pas qu'un jeune homme de vingt et un ans seulement ait pu avoir une telle expérience de la vie pour décrire avec tant de finesse la psychologie de ses personnages et écrire une œuvre aussi volumineuse.

Les défenseurs de Mikhaïl Cholokhov proclamaient d'une seule voix que le talent n'attend pas le nombre des années et que l'absence de formation scolaire n'empêche pas de faire de la littérature. Ils citaient les noms de Johann von Goethe, Thomas Mann, Maxime Gorki et Ivan Bounine, lauréat du Nobel de lttérature en 1933.

2. Cosaque dans l’âme

Mikhaïl Cholokhov passa son enfance dans un village cosaque. Celui qui écrivit tant de textes brillants sur les cosaques ne l’était pas lui-même. Son père, gérant d’un moulin à vapeur, n’appartenait pas à cette communauté. Sa mère était paysanne. Avant son mariage, elle avait travaillé comme femme de chambre. Mikhaïl Cholokhov était considéré comme un enfant naturel dans la mesure où sa mère l’avait mis au monde après avoir été mariée de force à un autre homme que son père. À la mort de son beau-père, ses parents purent se marier à l’église.

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3. Soutenu par Jean-Paul Sartre

Le 24 octobre 1964, Jean-Paul Sartre publiait une tribune dans le quotidien français Le Monde dans laquelle il motivait son refus du prix Nobel de littérature. On pouvait y lire ces lignes : « Il est regrettable qu’on ait donné le prix à Pasternak avant de le donner à Cholokhov, et que la seule œuvre soviétique couronnée soit une œuvre éditée à l’étranger et interdite dans son pays ».

Dominique BERRETTY/Gamma-Rapho via Getty Images
Dominique BERRETTY/Gamma-Rapho via Getty Images

Beaucoup sont d’avis que cette déclaration du philosophe français encouragea le comité Nobel à distinguer, l’année suivante, Mikhaïl Cholokhov « pour la puissance artistique et l’entièreté avec lesquelles il a illustré, dans son épopée du Don, une période cruciale dans l’histoire de la Russie » .

4. Rescapé de la peine de mort

Mikhaïl Cholokhov commença à travailler à l’âge de quinze ans et exerça un grand nombre de métiers : de débardeur à maître d’école. En 1922, alors qu’il remplissait les fonctions d’inspecteur de l’administration fiscale dans un village cosaque, il fut arrêté et jugé pour avoir accepté des pots-de-vins. Le tribunal le condamna à être passé par les armes. Son père versa une énorme caution et présenta aux autorités judiciaires un nouvel acte d’état civil d’après lequel Mikhaïl Cholokhov n’avait pas dix-sept, mais quinze ans. Sa condamnation à mort fut commuée en un an de colonie pénitentiaire pour mineurs. On se demande aujourd’hui encore pourquoi le jeune homme n’atteignit jamais le lieu où il devait purger sa peine.

Pavel Gorchkov / Sputnik Mikhaïl Cholokhov
Pavel Gorchkov / Sputnik

5. En froid avec Soljenitsyne

Les relations qu’entretenaient Mikhaïl Cholokhov et Alexandre Soljenitsyne ne furent jamais bonnes.

Ivan Denissenko / Sputnik
Ivan Denissenko / Sputnik

Dans les années 1970, l’auteur du Pavillon des сancéreux fut l’un de ceux qui reprirent les accusations de plagiat à l’encontre de Mikhaïl Cholokhov. Ce dernier fut l’un des signataires de la lettre d’un groupe d’écrivains soviétiques à la rédaction du journal Pravda datée du 31 août 1973 au sujet de Soljenitsyne et Sakharov. Ils les accusaient d’avoir tenté « d’engendrer la méfiance à l’égard de la politique menée par l’Union soviétique en faveur de la paix ». Quelques années plus tôt, en écrivain fidèle au Parti communiste soviétique, Mikhaïl Cholokhov s’était opposé à ce qu’Une Journée d’Ivan Denissovitch soit récompensée du Prix Lénine.

Steve Liss / Getty Images Alexandre Soljenitsyne
Steve Liss / Getty Images

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Bonus : Le Don Paisible adapté à l’écran

Le Don Paisible fut porté trois fois à l’écran : en 1930, 1958 et 1992. La version de 1958 que l’on doit au célèbre réalisateur Sergueï Guerassimov reçut de nombreux prix internationaux.

Sergueï Oursouliak/ Rossiya-1, 2015 Alexander Yatsenko as Mikhail Koshevoy na adaptaçao de 2015
Sergueï Oursouliak/ Rossiya-1, 2015

La troisième adaptation est signée d’un metteur en scène non moins talentueux : Sergueï Bondartchouk, qui avait été récompensé d’un Golden Globe et d’un Oscar pour Guerre et Paix. Il s’agissait d’une co-production russo-italo-britannique. Le producteur italien fit faillite et les bobines du film presque terminé furent saisies par une banque italienne. Sergueï Bondartchouk ne vit jamais son film terminé. Son fils Fiodor retravailla le montage de son père pour en faire une série télévisée.

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