Ivan Mitchourine, scientifique russe qui a bouleversé les lois de la nature

Viktor Evstafiev/Musée Darwin
Viktor Evstafiev/Musée Darwin
Il a créé plus de 300 nouvelles variétés de fruits et de baies, notamment de pommiers, poiriers, cerisiers, pruniers, abricotiers et vignes. Il a, en outre, repoussé les limites de la culture fruitière vers le nord, vers les régions du centre et du Nord de la Russie.

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« Nous ne pouvons pas attendre les faveurs de la nature. Les lui prendre est notre tâche » : si pratiquement chaque Russe connaît cette phrase, peu nombreux sont ceux qui savent à qui elle appartient. Comme vous l’aurez compris, on la doit au célèbre biologiste et phytogénéticien russe et soviétique Ivan Mitchourine (1855-1935), homme qui a littéralement transformé la nature des plantes de ses propres mains.

Viktor Evstafiev/Musée Darwin
Viktor Evstafiev/Musée Darwin

Dès l’âge de cinq ans, Mitchourine a été élevé par son père, dont il a hérité la passion familiale pour le jardinage. Ce dernier lui a transmis l’amour de la nature et des plantes. Très jeune, Mitchourine a manifesté un intérêt marqué pour les sciences naturelles : à huit ans, il connaissait déjà les principales techniques de greffe, aidait son père au rucher et au jardin, et consacrait son temps libre à l’étude de la biologie.

Après avoir terminé une école provinciale, Mitchourine a nourri le rêve d’intégrer un lycée de la capitale. Cependant, la faillite familiale et la vente du domaine pour rembourser les dettes ont fait tomber ses projets à l’eau. Il a été inscrit au gymnase de Riazan (équivalent des petits et grands lycées sous l’Empire russe), mais en a été renvoyé pour manque de respect envers l’administration. Contraint de travailler, il a d’abord été commis dans une gare, où il a rapidement gravi les échelons jusqu’à devenir assistant du chef. Parallèlement, il a étudié le télégraphe et l’électricité.

En 1875, malgré ses modestes revenus, il a loué un petit domaine, où il a créé sa première pépinière. Tout en travaillant aux chemins de fer, il consacrait l’intégralité de son salaire à l’achat de semences, de plants et d’ouvrages spécialisés. Sa femme l’a soutenu avec dévouement dans toutes ses démarches.

Viktor Evstafiev/Musée Darwin
Viktor Evstafiev/Musée Darwin

Sa persévérance a produit des résultats exceptionnels : il a créé des variétés de pommiers, de poiriers et de pruniers résistantes à l’hiver, et il a été le premier à cultiver des cerisiers, des amandiers, de la vigne et d’autres cultures dans la Russie centrale. Pour mesurer l’ampleur du travail de ce scientifique autodidacte, il suffit de rappeler qu’il a considérablement diversifié le verger russe : les pommiers et les poiriers sont devenus plus grands et plus variés dans cette partie du pays, et ils ont été complétés par des arbres fruitiers typiques du Sud, inimaginables sous ce climat. Il a également posé les bases de la sélection végétale moderne, et ses méthodes sont encore utilisées aujourd’hui par les phytogénéticiens du monde entier.

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La renommée de Mitchourine a dépassé les frontières de la Russie. Il a reçu des offres d’emploi de l’étranger, notamment une invitation officielle à venir travailler aux États-Unis en 1913, qu’il a toutefois déclinée.

Après la Révolution, son œuvre a bénéficié du soutien du gouvernement soviétique et de l’estime personnelle de Vladimir Lénine. Mitchourine est devenu l’un des sélectionneurs de plantes les plus renommés du pays, a reçu les plus hautes distinctions d’État, et des instituts de recherche ont été créés à partir de sa pépinière. Bien qu’il n’ait reçu aucune formation spécialisée, il a néanmoins obtenu le titre de docteur ès sciences biologiques et a été nommé membre honoraire de l’Académie des sciences de l’URSS.

Viktor Evstafiev/Musée Darwin
Viktor Evstafiev/Musée Darwin

À l’occasion du 170ᵉ anniversaire de la naissance de Mitchourine, le Musée Darwin de Moscou accueille l’exposition Jardiniers et arboriculture. Celle-ci présente des œuvres de l’artiste Viktor Evstafiev, des ouvrages rares du XIXᵉ siècle consacrés au jardinage, ainsi que des documents d’archives retraçant la vie et les réalisations du célèbre scientifique. L’exposition est ouverte jusqu’au 14 décembre.

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