Pourquoi dit-on en Russie «Grattez le Russe et vous trouverez le Tatar»?
Cette expression est utilisée pour rappeler que les Russes sont issus du mélange de nombreux peuples. Cependant, contrairement à ce que l’on pourrait croire, elle n’a pas été inventée en Russie, mais en France.
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Les chercheurs associent l’apparition de cette expression au séjour des troupes russes à Paris en 1813-1814. À l’époque, la presse avait publié une expression acerbe suggérant que sous l’apparence raffinée des Russes se cachait une nature barbare : « Grattez le Russe, vous trouverez le Cosaque ; grattez le Cosaque, vous trouverez l’ours ». C’est à peu près ainsi que l’entendait le marquis Astolphe de Custine, qui visita la Russie en 1839 et écrivit un livre à ce sujet. « Les mœurs des Russes sont cruelles [...] Car il y a à peine plus de cent ans, ils étaient de vrais Tatars. Et sous le vernis de l’élégance européenne, la plupart de ces parvenus de la civilisation ont conservé une peau d’ours – ils n’ont fait que la porter avec la fourrure à l’intérieur. Mais il suffit de les gratter un peu — et vous verrez comment les poils sortent et se hérissent », s’indignait le marquis.
En Russie, cette expression était initialement utilisée en français. Par exemple, Fiodor Dostoïevski, dans son Journal d’un écrivain, remarquait avec ironie : « Les Européens ne voulurent pas plus qu’avant admettre que nous fussions des leurs. "Grattez le Russe, disaient-ils, et vous trouverez le Tartare". Et cette opinion a encore force de loi : Nous leur avons fourni un proverbe ».
Toutefois, avec le temps, cette expression a pris un sens propre. Certains l’ont utilisée dans son sens le plus large et l’ont étendue à d’autres peuples : « Grattez le Russe, vous trouverez le Parisien. Grattez le Parisien, vous trouverez le Russe ; grattez encore, vous trouverez le Tatar », souriait Piotr Viazemski. Néanmoins, le plus souvent, l’on a commencé à l’utiliser pour désigner le mélange des sangs de différents peuples. De plus, de nombreuses familles russes nobles avaient effectivement des origines tatares. C’était le cas, par exemple, des princes Ioussoupov, Ouroussov, Narytchkine et des comtes Apraksine.
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