Comment un Hollandais s’est-il retrouvé sur l’île de Sakhaline, dans l’Extrême-Orient russe?

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Pourquoi la Russie ?

Peter vit dans le village de Khristoforovka. Il possède une grande exploitation, une écurie, de nombreux animaux et des terres. Et au-dessus de sa petite maison, flotte le drapeau russe.
Il est arrivé en Russie il y a 23 ans. À l’époque, sa femme s’était vu proposer un travail consistant à sauver les baleines grises dans la mer d’Okhotsk. Peter était spécialiste des oiseaux, il travaillait dans des réserves naturelles à travers le monde et il a accepté sans hésiter de se rendre à Sakhaline. Son rêve était de travailler avec les pygargues empereurs, et il savait que l’on en trouvait dans la région.
Comment a-t-il découvert l’hiver en Extrême-Orient ?

Lorsque Peter s’est rendu à Sakhaline, il ne se rendait pas vraiment compte à quel point le climat y était rude.
« J’aime beaucoup le climat scandinave, je sais ce que sont le nord, le froid et la neige. Lorsque je vivais en Amérique centrale, en Amérique latine et en Afrique, j’avais toujours terriblement chaud. J’ouvrais souvent le réfrigérateur et y plongeais la tête pour respirer l’air froid. Et je rêvais de neige », dit Peter en riant.
Quand ils sont arrivés à Sakhaline, il se rendait tous les jours au zoo à vélo en tant que bénévole. Un jour, il s’est mis à neiger soudainement et, en une heure et demie, il y avait tellement de neige qu’il n’a pas pu rentrer chez lui. Les routes ont été fermées pendant quatre jours.
« Telle fut ma première expérience de l’hiver à Sakhaline. Mais j’ai tout de suite compris ! Il peut tomber jusqu’à trois mètres de neige en une nuit, impossible d’ouvrir la porte de la maison. Il me faut deux à trois heures pour creuser ces dix mètres jusqu’à l’écurie. Mais dans l’écurie, il y a toujours une réserve de foin pour quatre jours, c’est Sakhaline qui m’a appris cela ».
Peter a également été témoin d’autres catastrophes naturelles, notamment des typhons. Il comprend généralement que quelque chose de terrible approche grâce aux chevaux, qui se comportent de manière agitée. « Les prévisions météorologiques peuvent se tromper, mais les chevaux, jamais. Et avant un changement de temps, avant une catastrophe, un silence particulier s’installe ici... ».
Sauvetage de chevaux et rencontre avec les ours

Le principal bâtiment de la propriété de Peter est l’écurie, où il s’occupe des chevaux. Certains ont été récupérés au zoo, d’autres rachetés à un centre de location où ils vivaient dans des conditions épouvantables. Il y a aussi des chevaux sauvages qui ont été séparés du troupeau à cause d’une maladie.
« Ce gaillard qui tape du sabot, il s’appelle Nicolas, c’est le plus âgé. Si je n’avais pas commencé à le nourrir avec de la bouillie il y a trois ans, il serait mort. Mais il est en vie, c’est un beau mâle édenté ».
Peter parle des chevaux comme s’il s’agissait d’êtres humains. Chacun a son caractère, chacun nécessite une approche particulière. Et il aime travailler précisément avec les individus difficiles, qui peuvent même avoir des problèmes psychologiques.
Il a vu à plusieurs reprises d’autres habitants de Sakhaline : les ours bruns. Lorsque les baleines grises s’approchent du rivage, les ours sont toujours là, attendant qu’une baleine morte soit rejetée sur la plage pour se régaler.
Il arrive que les ours viennent dans le village, surtout la nuit, et attaquent le bétail, et parfois même les humains. Peter s’inquiète pour ses chevaux et ne dort presque pas. Un jour, au crépuscule, il a regardé par la fenêtre et a vu un ours à 15 mètres de la maison. Peter a lancé une grenade assourdissante et l’animal s’est enfui.
La vie dans un village russe

Il a divorcé de sa femme, qu’il avait suivie à Sakhaline. Il gère désormais seul sa grande exploitation. En 2022, beaucoup de ses assistants étrangers sont partis, mais Peter n’a pas pu abandonner ses chevaux. Depuis trois ans, il travaille 15 à 17 heures quotidiennement, sans jour de repos.
Peter salue joyeusement ses voisins et leur fait signe de la main. « C’est ça, la campagne russe ! ». Sa cour est toujours ouverte à tous.
« Les gens viennent me voir aussi parce que je leur donne du fumier pour leurs serres à un prix très avantageux. Et si quelqu’un a besoin de foin pour la niche de ses chiens, il peut en prendre gratuitement. Ensuite, ils m’apportent leurs concombres, leurs tomates et leurs poivrons en bocaux, ce qui me suffit pour l’hiver. C’est très agréable. Ce n’est pas pour l’argent, nous nous aidons simplement les uns les autres. Je ne me souviens pas avoir vu cela aux Pays-Bas ».

La version complète de l’article est publiée en russe sur le site web du magazine Nation.
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