Russian Bill: ce hors-la-loi du Far West qui affirmait appartenir à une noble famille russe
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Cette histoire commence comme un western spaghetti : une petite ville à la frontière avec le Mexique, des habitants paisibles terrorisés par un gang impitoyable et un personnage étrange, complètement décalé dans ce décor typique. Pourtant, ce dernier n’est en aucun cas le « gentil » de cette histoire.
Le gang de Clanton
En 1873, un cowboy du nom de Newman Haynes « Old Man » Clanton est arrivé sur le territoire de l’Arizona avec ses fils. S’étant établi dans la ville de Tombstone, ils ont rencontré d’autres cowboys et créé un ranch. Initialement impliqués dans le transport et l’élevage, les « Cowboys » - le nom sous lequel le gang est devenu célèbre – se sont rapidement spécialisés dans les activités illégales.
L’un des criminels les plus impitoyables du gang était William Brocius, largement connu sous le nom de Curly Bill Brocius (« le frisé »). Au sein du gang, Curly Bill avait la réputation d’être un virtuose du tir. « Il était capable de frapper des lièvres en pleine course, de tirer sur les flammes de bougies sans toucher les bougies ou les lanternes, et de placer des balles entre les doigts des volontaires », a écrit l’auteur Billy Breakenridge à propos de Curly Bill.
Couplé à sa mauvaise humeur, son talent pour le tir créait des ennuis aux personnes qui avaient la malchance de se retrouver sur son chemin. Pour s’amuser, Curly Bill a tiré des coups de feu pour faire « danser » un prédicateur pendant un sermon et forcé des Mexicains à se déshabiller et à danser nus à une autre occasion. Plus grave, Curly Bill tuait impunément des gens.
Ce serait un euphémisme de dire que Curly Bill terrorisait ceux qu’il croisait. Pourtant, une personne était capable d’apaiser sa mauvaise humeur et de la contrôler : un autre hors-la-loi totalement décalé dans ce décor de western typique.
« Bill le Russe »
Un hors-la-loi qui s’appelait William Tattenbaum a obtenu le droit d’intégrer le gang. Pourtant, il ne l’a pas fait en raison de ses compétences de tir ou de sa cruauté. Sa particularité, c’était surtout sa réputation de dandy.
On dit que Tattenbaum avait des cheveux blonds bouclés et une moustache soignée. Il s’habillait toujours avec une extrême élégance et avait un grand souci du détail.
En plus de cela, Tattenbaum entretenait une légende très inhabituelle au sujet de ses origines. Le dandy prétendait être un noble russe et avoir été hussard dans la cavalerie du tsar. Pour cette raison, les autres hors-la-loi l’ont surnommé « Russian Bill ».
On sait peu de choses du personnage et de sa vie. Un article du New York Times publié le 23 septembre 1883 semble être la seule source d’information sur cette personnalité singulière.
« Son apparence aurait attiré l’attention n’importe où, mais vêtu dans une tenue de cow-boy sophistiquée, il était particulièrement remarquable. Ses traits ciselés, sa longue moustache tombante et ses cheveux blonds, qui dévalaient en boucles sur ses épaules, suscitaient un intérêt particulier chez les étrangers », décrit le reporter du New York Times, qui affirme avoir rencontré Russian Bill.
Avec le reste du gang, Russian Bill volait du bétail et emmenait le fruit de son larcin de l’autre côté de la frontière, au Mexique, où les animaux étaient vendus. Bien que Russian Bill ait prétendu avoir tué des gens, on ne dispose d’aucun témoignage écrit de ses contemporains à ce sujet, qui se contentent de mentionner le vol de bétail.
Il semblait néanmoins avoir d’autres talents. « Russian Bill était un homme possédant une solide éducation ; il parlait couramment quatre langues et se réjouissait chaque fois que l’occasion de parler littérature, science ou art [se présentait]. De son passé, on ne savait rien, si ce n’est qu’il venait de Russie et, comme le fait de poser des questions sur un sujet aussi délicat aurait été perçu comme une insulte, personne n’a tenté de découvrir pourquoi un homme d’une telle élévation mentale avait rejoint une bande de hors-la-loi », lit-on dans l’article du New York Times.
Le malfrat en question prétendait être le descendant d’une noble famille de Russie. Si tel était le cas, le fait qu’il parlât de nombreuses langues semble plausible, car la noblesse russe recevait traditionnellement une éducation de haut niveau et parlait plusieurs langues, en particulier le français, et ce dès l’enfance.
Cependant, d’autres informations sont impossibles à vérifier. Par exemple, Russian Bill a raconté qu’il avait servi dans la cavalerie du tsar en tant que hussard et avait fui le pays, car il allait être déféré devant une cour martiale pour avoir frappé un officier supérieur. Bien que cette affirmation ne puisse être ni réfutée, ni confirmée, l’incident aurait théoriquement pu se produire, car les hussards étaient connus pour leur caractère bien trempé et leurs actions impulsives.
« Saleté de nuisance » à Shakespeare
Quoi qu’il en soit, pour Bill, la fin est arrivée dans la ville de Shakespeare, Nouveau-Mexique.
Bill s’est lié d’amitié avec Sandy King, un hors-la-loi et voleur qui s’était installé à Shakespeare, au Nouveau-Mexique, troublant la paix de cette bourgade et obtenant rapidement une réputation de tyran dans la ville. Suivant les traces de son ami, Russian Bill s’est lui aussi rendu à Shakespeare.
Le 9 novembre 1881, après que Sandy King a été arrêté et jeté en prison pour avoir tiré sur le doigt d’un commerçant durant une dispute, Russian Bill n’a pas perdu de temps à chercher à libérer son ami, décidant plutôt de continuer à dérober des chevaux qu’il trouvait dans la ville. Immédiatement pris en flagrant délit, il a retrouvé son ami derrière les barreaux.
Un comité de vigilance – des particuliers qui avaient pris en main l’application des lois – a rapidement jugé Russian Bill et l’a condamné à la pendaison. Son ami Sandy King a été proclamé « saleté de nuisance » et également condamné à la potence.
Les bourreaux ont traîné les deux hors-la-loi dans une salle d’audience de fortune située dans la salle à manger de l’hôtel local, jeté des cordes sur les poutres, placé des nœuds coulants autour de leur cou et pendu les deux hommes jusqu’à ce que mort s’ensuive.
C’est ainsi que se termine l’histoire de Russian Bill, un étrange hors-la-loi qui prétendait être venu dans le Far West depuis la lointaine Russie.
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L’auteur de l’article du New York Times ajoute une remarque qui a de quoi intriguer :
« Il y a peu de temps, le shérif du comté de Grant, Nouveau-Mexique, a reçu une lettre du consul américain à Saint-Pétersbourg, disant que la comtesse Telfrine était très désireuse de savoir où se trouvait son fils, qui avait été banni pour des raisons politiques, mais qui possédait de vastes domaines. La lettre incluait une photographie de Russian Bill. On a dit au comte qu’il s’était suicidé à Shakespeare il y a deux ans, et les vrais faits ont été cachés à sa mère ».
Il est cependant difficile de déterminer si ce rapport dit vrai. D’une part, le nom de Telfrine n’est pas d’origine russe. De plus, la comtesse qui porte ce nom n’apparaît qu’en relation avec l’histoire de Russian Bill.
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